«Nous sommes censés vivre dans un État laïque, où de telles pratiques ne devraient pas avoir lieu, mais malheureusement, cela devient notre nouvelle réalité»
, explique un chrétien de ce village.
«Ne soyez pas surpris d’être attaqués»
Il y a quelques mois, les partenaires de Portes Ouvertes alertaient déjà que la commune de Dougouténé s’était vu imposer la jizya. Les jihadistes ont demandé à rencontrer les pasteurs: «ils nous ont donné toutes les nouvelles règles que tous les habitants de la région devaient suivre. Ils ont dit que ce n'était pas la guerre, mais qu'ils voulaient nous informer de leurs intentions afin qu'il n'y ait pas de surprise lorsqu'ils attaqueront», a déclaré l’un d’eux.
Une nouvelle réalité
La jizya fait partie de la persécution croissante des chrétiens dans la région du Sahel.
En juin, les hommes de plus de 15 ans de la région frontalière de Tillaberi, à l’Ouest, du côté du Niger et du Burkina Faso, ont également reçu l'ordre de commencer à payer la jizya ou de se convertir à l'islam.
Le Mali est en proie à des insurrections islamistes depuis plus d'une décennie. Le gouvernement militaire, qui a pris le pouvoir en 2021, est aux prises avec les combattants du «Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans» (GSIM).
Dans certaines régions du Mali, du Burkina Faso, du Niger et du Nigeria, des extrémistes islamistes liés au terrorisme mènent des attaques contre les civils et les forces gouvernementales. L'État islamique au Grand Sahara (EIGS), l'État islamique en Afrique de l'Ouest (EIAO) et le GSIM, lié à Al-Qaïda, opèrent les uns à côté des autres.
Appauvrir les chrétiens
L’imposition de la jizya est une pratique qui avait été mise en place lors de l'occupation de l'Irak et de la Syrie par les combattants de l’Etat islamique (EI) de 2014 à 2017.
Au Moyen-Orient, l’EI a utilisé la jizya comme un outil pour appauvrir les communautés chrétiennes. Les analystes de Portes Ouvertes estiment que les cas qui émergent au Mali ne sont pas isolés, mais font partie d'un plan systémique plus large.
«Les familles qui refusent ou n'ont pas les moyens de payer sont chassées de leurs terres – des endroits où elles ont grandi et vécu toute leur vie. L'impact physique et émotionnel à long terme est dévastateur»
explique Jo Newhouse*, porte-parole de Portes Ouvertes en Afrique subsaharienne.
La jizya au Mali n'est qu'un aspect de la persécution à laquelle sont confrontés les chrétiens. La violence a entraîné la fermeture d'écoles, des pénuries alimentaires, le recrutement d'enfants soldats et le déplacement de populations chrétiennes, tandis que les missionnaires chrétiens vivant au Mali sont constamment menacés d'enlèvement.
*Nom d’emprunt pour des raisons de sécurité
Légende: Image représentative d'une église
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